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Tout le bien que je pense de JEDI


La semaine dernière, j’étais invité, au lancement de JEDI.

JEDI, c’est quoi ?

JEDI – Joint European Disruptive Initiative

Selon la chambre américaine du commerce en France, la Joint European Disruptive Initiative est une initiative européenne majeure qui fédère l’essentiel des grands centres de recherche, des start-ups “deeptech” et des groupes technologiques, en France et en Allemagne. Elle propose la mise en place d’un outil de financement des innovations de rupture, sur le modèle de la DARPA américaine, une proposition reprise par le Président de la République dans son discours à la Sorbonne. Née sous l’impulsion d’André Loesebrug-Pietri, Didier Schmitt et Jean-Paul Palomeros, J.E.D.I. milite pour que cet outil d’un milliard d’euros par an soit l’occasion d’un nouveau “pacte de confiance” entre l’Etat et l’écosystème de l’innovation.

Concrètement, il s’agit de mettre en place une DARPA — « Defense Advanced Research Projects Agency » — à la française. La DARPA, c’est quoi ? Il s’agit d’une agence créée en 1957 sur proposition du président américain Eisenhower, quelques mois après le premier vol spatial soviétique Spoutnik.

Comme je l’explique d’ailleurs dans mon dernier livre, les dirigeants américains restent stupéfaits par la réussite du concurrent soviétique, lequel a connu de vastes destructions matérielles, humaines et industrielles sur son propre territoire seulement 15 ans auparavant au cours de la Deuxième Guerre mondiale. Mais, voici qu’il devance les États-Unis sur le terrain technologique et scientifique.

L’administration américaine prend conscience du retard accumulé. On souhaite mobiliser l’ensemble du pays autour de projets qui doivent répondre à un besoin concret, opérationnel et tangible, dans un contexte où, la guerre froide précipite les deux géants dans une course à l’armement.

Concrètement, la DARPA reste une agence du département de la Défense en charge de la Recherche et Développement. Elle est constituée de 220 individus et d’un budget de 2,4 milliards d’euros par an. Ils formalisent des concours et mettent en compétition des acteurs privés comme des organisations publiques. Une centaine de gestionnaires de projets supervisent 250 dossiers par an dans six domaines. La DARPA demeure le siège d’innovations reconnues telles que l’ancêtre de l’Internet (ARPANET), le GPS et le Radar passif.

Mais, c’est surtout, le président Kennedy qui trouve les mots pour réunir tous les innovateurs de son temps en les appelant à relever le défi d’alunir avant la fin des années 60. Ce discours est considéré, encore aujourd’hui, comme l’un des plus mobilisateurs de la deuxième moitié du XXe siècle.

Citons également le challenge président Reagan : développer un réseau de satellites pour mener une guerre défensive dans les étoiles avant la fin des années 2000.

Au fil des années, la DARPA matérialise des avancées technologiques tout en résolvant des cas concrets. Ainsi, en 2004, 2005 et 2007, on met en compétition des innovateurs du monde entier pour fabriquer une voiture pouvant conduire de manière autonome dans le désert du Nevada. Et plus récemment, le challenge invite des roboticiens à créer une machine, à l’image d’un « ouvrier artificiel », pouvant réaliser des opérations de maintenance dans un site industriel, quelques mois après la catastrophe de Fukushima où les robots nippons, pourtant considérés comme les plus sophistiqués, ne s’avèrent, finalement, que d’une utilité limitée.

Pourquoi Jedi ?

Pourquoi Jedi ? La réponse demeure toute simple. L’Europe appelle à fabriquer des entreprises innovantes. Les Gafa sont californiennes, les NATU aussi et les BATX restent chinoises. Où sont les Européens ?

En vérité, encore prisonniers d’un paradigme technologique et économique marqués par la reconstruction suivant la Deuxième Guerre mondiale, les Européens améliorent ce qui existe, là où l’innovation suppose d’inventer le nouveau. Mais beaucoup considèrent que la véritable lacune européenne ne provient pas d’un défaut d’imagination mais plutôt d’une difficulté à consolider l’Europe et à bâtir un marché unique européen. Bon nombre d’investisseurs tels que Thiery Vandewall, Marie Ekeland, Philippe Collombel, estime que, ce qui manque à l’Europe, c’est la capacité d’adresser un marché européen homogène. Car celui-ci reste encore très fragmenté. Les startups françaises, s’étant déjà développées dans l’Hexagone, préfèrent poursuivre leur croissance outre-Atlantique dans un vaste marché de plus de 300 millions de consommateurs, plutôt que d’éparpiller leurs efforts à travers une multitude de pays européens disposant chacun de spécificités, culturelles, linguistiques et administratives.

D’où la même question : pourquoi JEDI ?

Il s’agit de formuler un challenge européen mettant en compétition des acteurs venus d’Europe et d’ailleurs afin de faire travailler les Européens ensemble par delà les particularités nationales, réglementaires et de langues. Et lorsque je m’y suis rendu, j’ai constaté le caractère très multiculturel de l’audience et ce désir paneuropéen de réussir l’innovation. C’est peut-être ça qui m’a le plus surpris. Car je le connais relativement bien les milieux d’innovation français et américains. Je les ai côtoyés en Suisse, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Italie et en Espagne. Mais c’est la première fois, en effet, que j’ai vu une association paneuropéenne. Et il y avait une énergie particulière. C’est l’énergie de ceux qui s’embarquent dans une aventure sans en discerner la destination finale. L’espérance et le désir tiennent lieu de boussole.

Aujourd’hui, JEDI est soutenu par le Président de la République Emmanuel Macron :


Autre chose de très intéressant : la prédominance des cerveaux « droits ». Car chacun sait que dans les entreprises, on privilégie l’efficacité, l’analyse, l’exécution, et la rigueur. Mais jamais ne s’autorise-t-on à donner davantage de place à la créativité, l’empathie, la faculté à sentir le « Tout ». Or, on trouve cette prédominance du cerveau droit chez JEDI. L’expérience cognitive demeure très stimulante.

 

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