Comment réussir l’innovation dans les grandes entreprises ? Et pourquoi l’Europe ne parvient-elle pas à créer en son sein des GAFA, à la différence des États-Unis et de la Chine ? Comment multiplier les licornes en Europe ? Voici quelques-unes des questions que Luc Bretones, directeur du Technocentre chez Orange et Président de l’institut G9+, et moi-même avons évoquées au cours d’une discussion récente.
La difficulté de l’innovation dans les grandes entreprises
De manière générale, beaucoup d’entreprises ont du mal à se réinventer au-delà de leur raison d’être initiales. Les constructeurs automobiles, par exemple, produisent des véhicules à foison mais elles peinent à imaginer d’autres modalités de déplacement. Mais, avec l’essor de la voiture autonome électrique, les vélos et trottinettes en libre service et un jour les drones individuels, on voit bien que la mobilité amorce une profonde mutation.
De la même façon, pour citer un exemple connu de tous, Kodak fut l’inventeur de la photographie argentique. L’entreprise américaine financée à la Belle Époque à Paris ne parvint pourtant pas à prendre le virage du digital. Car, beaucoup d’acteurs industriels disparaissent avec obsolescence des infrastructures technologiques.
Il s’agit là d’ailleurs de ce qu’on appelle parfois le « dilemme de l’innovateur ». Clayton Christensen, professeur à la Harvard Business School, évoque le cas des innovateurs dans les grandes organisations où des produits novateurs ne sont pas soutenus parce qu’ils menacent des lignes de revenus existantes. Et puis un jour, une startup conçoit ce produit futuriste et voici que l’acteur établi voit sa rente de situation disparaître du jour au lendemain.
Les réticences culturelles à innover
À cela s’ajoute une sorte de réticence culturelle à l’innovation, notamment en France. Luc me parle de l’une de ces discussions avec Christophe Sapet, fondateur de Navya, ce constructeur de minibus autonome. Il lui demande où il trouve ses appels d’offres les plus porteurs. On pourrait s’attendre à ce que les entreprises françaises en génèrent un nombre élevé. Mais, ce sont les acteurs d’Asie ou des États-Unis qui figurent en tête de liste.
Pourtant, aujourd’hui, alors que la capitale française s’apprête à accueillir les J.O. en 2024, donner naissance à la première ville en matière de transport des voitures autonomes pourrait envoyer un message de modernité !
Le sens de la compétence et de l’autorité
A cette difficulté culturelle, des comportements un peu particuliers se diffusent dans bon nombre d’entreprises. Ainsi, pour asseoir une position hiérarchique, on a coutume d’évoquer l’effectif de l’équipe. Plus celle-ci est élevée, plus le chef peut se prévaloir d’une autorité légitimée. Mais, Luc fait partie d’un certain nombre de jurys comme celui du Club Ivy. Celui-ci sélectionne les entrepreneurs de moins de 30 ans les plus prometteurs. Lorsque ces derniers se présentent, ils mettent surtout en avant la scalabilité technologique de leurs startups. Avec un effectif réduit on peut faire beaucoup. Luc me parle notamment WhatsApp. Au moment où Facebook la rachète, elle compte 55 collaborateurs et une valorisation à 19 milliards de dollars…
Réussir l’innovation en Europe veut dire créer un écosystème de licornes
Nous le disions tout à l’heure : l’Europe est le seul continent qui peine à créer des licornes en grande quantité. Luc a eu plusieurs discussions avec Thierry Breton, PDG d’Atos et ancien ministre de l’Économie. L’Europe a structuré l’espace territorial, maritime et aérien. Organiser le domaine informationnel s’avère désormais nécessaire. Car, si les États-Unis et la Chine parviennent à fabriquer des leaders du numérique, c’est parce qu’elle dispose d’un marché de donnée et d’une puissance de calcul. À l’inverse, au sein d’une Europe fragmentée, construire des filières industrielles se révèle notoirement difficiles. En particulier, on pourrait exiger que les données européennes soient stockées et traitées en Europe selon des modalités que l’Union européenne aurait déterminées.
Bâtir le marché européen des données demeure sans doute la première chose à faire, si l’on souhaite faciliter l’éclosion de GAFAs européennes au moment même où l’économie digitale crée des emplois en grand nombre. Dans mon dernier livre, j’évoque notamment que 7 technologies numériques pourraient générer de l’ordre de 20 millions de jobs au salaire mensuel de 2200 euros. Engager les transformations pour réussir l’innovation en Europe s’avère nécessaire.
[…] fair, I’ve discussed this on several occasions with the founder of JEDI, the head of Orange’s Technocenter and leading VCs. Plus, I published a book on how to turn France into the Silicon Valley by […]
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Article très intéressent, j’ai du mal a comprendre pourquoi l’Europe reste autant à la traîne comparé aux Etats Unis ou à la Chine…