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«L’innovation bouleverse les acteurs établis de la presse écrite», selon Philippe Colliat


Les acteurs établis de la presse écrite sont remis en cause par la presse numérique. Que faire?

Philippe Colliat

 

I/ L’innovation bouleverse les acteurs établis de la presse écrite: les acteurs établis de la presse écrite voient leur modèle économique bouleversé par la presse numérique.

  • D’une part, la diffusion payante de la presse écrite a baissé de 25 % en cinq ans en Europe de l’Ouest (source WAN-IFRA 2013)
  • D’autre part, le marché des petites annonces, autrefois une manne pour la presse écrite, est en recomposition. En 2000, la presse écrite détenait 100 % du marché des petites annonces. Aujourd’hui, la presse écrite n’en détient plus qu’un petit 50 %, au détriment des acteurs numériques (sites internet) qui se sont accaparé la moitié du marché. De là, une perte de revenus considérables (Idate).
  • Enfin, pour chaque dollar gagné dans les publicités digitales, la presse écrite en perd 6 dans la publicité de la presse écrite (chiffres Pew Internet 2012 & 2013) !

 

II/ Les acteurs établis de la presse écrite peinent à s’adapter à ce nouveau contexte

  • Que faire face à l’avalanche des contenus gratuits ? Certains acteurs de la presse écrite, comme Le Monde, ont donné eux-mêmes accès gratuitement à leur contenu. D’autres ont rendu leur contenu 100% payant, comme Les Echos dans un premier temps. Echec dans les 2 cas. Enfin, ils ont adopté un modèle hybride où l’on trouve à la fois du contenu gratuit et payant. Modèle du « freemium », des paywalls etc .. Jouer l’audience et le porte-monnaie, le parti-pris de + de 50% des éditeurs US désormais, largement leaders en la matière.
  • D’autres grands acteurs de la presse écrite, comme France Soir, La Tribune et surtourt Newsweek aux États-Unis, ont totalement abandonné la diffusion papier, au profit d’une présence accrue sur Internet.
Newsweek

III/ Les nouveaux acteurs proposent des modèles innovants

  • D’une part, des acteurs tels que Scoop it, ou Flipboard proposent aux internautes de créer par eux-mêmes leur propre journal.
Droits d’auteur: Scoop.it! Flipboard
  • D’autre part, on trouve de nouveaux acteurs, tels que Melty, qui, s’appuyant sur un algorithme, cherchent à prédire la demande du marché. Ils ont recours à des blogueurs ou des pigistes qui vont produire un contenu qui sera lu, en fonction de la demande du marché et optimisé pour le SEO.
  • Par ailleurs, de nouveaux journaux, tels que L’Opinion, investisse surtout sur leurs présences sur internet. Ils n’ont recours qu’à une diffusion papier qu’en tant que produit d’appel. C’est le « reverse publishing » où internet prend donc une place prépondérante.
  • Enfin, on trouve également des acteurs qui se spécialisent dans le « datajournalisme ». Ces acteurs cherchent non pas à produire du contenu rédigé à l’écrit, mais plutôt des infographies. Les infographies apparaissent comme étant moins périssables que le contenu écrit. Par ailleurs, elles offrent une expérience utilisateur nouvelle et plus conviviale.

 

IV/ Néanmoins, des initiatives innovantes chez les acteurs de la presse traditionnelle voient le jour 

  • Ainsi l’Express a lancé en septembre dernier « L’Express Ventures », un fonds d’amorçage pour les nouveaux médias.  Le concept de cet accélérateur : le « media for equity ». L’Express propose la force de frappe publicitaire se son Groupe, sa puissance médiatique en échange de parts dans ces jeunes pousses à fort potentiel de croissance. Au bout de 6 mois plus de 150 startups auraient postulé pour ce programme. Une bonne façon pour L’express de rester dans la course.
  • L’exemple est à chercher aux Etats-Unis. Turner Broadcasting, la maison mère de CNN a en effet lancé, le Media Camp au sein de la Silicon Valley. A la fois fond d’investissement et incubateur spécialisé, son programme le plus recherché s’appelle L’académie : 12 semaines et 20 000 USD pour faire vos preuves. Au bout la possibilité de nouer un partenariat commercial et business avec le prestigieux mentor.

 

Voici donc quelques idées des bouleversements que l’on peut voir dans le domaine de la presse. Mais de façon plus générale, la question centrale de la valeur du contenu que produit la presse écrite est posée. Au moment où les acteurs établis cherchent à renouer avec des abonnements payants, comment redonner de la valeur au contenu éditorial afin de nouveau le monétiser? Comment déclencher l’acte d’achat auprès de lecteurs qui se sont habitués à des contenus gratuits ? C’est sans doute à une vraie révolution journalistique que nous allons assister : le lecteur s’attend à des contenus différents dispensés par un peu plus que des simples journaux en ligne…

 

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