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Mon voyage à New-York et San Francisco (2/5) : la professionalisation de l’innovation


Olivier de Conihout - L'Espace Dirigeants - San Francisco

Cet été, j’ai organisé, avec Olivier de Conihout, Fondateur et Directeur Général de L’Espace Dirigeants, un voyage à New-York et à San-Francisco. Dans cette série d’articles, j’évoque mes impressions. Dans un précédent billet, j’avais parlé de la démesure. Aujourd’hui, je parle de la professionalisation de l’innovation.

Au début des années 2010, au cours de mes précédents voyages, j’ai été interpellé par la créativité, l’imagination, la fantaisie et le désir d’expérimentation. Pour innover, il fallait avant tout essayer. On disait d’ailleurs qu’il fallait échouer vite (« fail fast ») et que l’échec faisait partie d’un phénomène d’apprentissage plus général. Cette fois-ci, à la fin des années 2010, ce qui m’a frappé c’est la professionalisation de l’innovation. Ceci passe par plusieurs choses très complémentaires :

  • L’innovation « waouh », c’est fini !
  • Les dirigeants de la Silicon Valley se sont aperçus que les valeurs californiennes ne sont pas universelles
  • l’innovation s’est professionnalisée
  • Fabrice Grinda, l’un des investisseurs les plus performants au monde, m’a beaucoup impressionné

A/ L’innovation « whaouh » s’est finie !

On attend désormais des résultats concrets, plutôt que du « branding », de la vision technologique ambitieuse et floue. J’ai l’impression qu’il y a toute une sorte d’idéalisme humaniste et utopique, autrefois très présent à San Francisco, qui paraît moins présent aujourd’hui. Il est vrai que les géants de la Tech ont beaucoup déçu ces dernières années notamment en raison de leur politique de confidentialité, de leurs difficultés à respecter la vie privée. Beaucoup des consommateurs se sont aperçus que si ces services digitaux novateurs sont gratuits, c’est parce que le produit de ces entreprises, ce ne sont pas les services en question mais plutôt l’utilisateur de ses services. 

La professionalisation de l’innovation passe aussi par l’idée que différentes types d’innovation peuvent véhiculer des valeurs différentes…

B/ La professionalisation de l’innovation, c’est comprendre que des produits novateurs ne sont pas dénués de signification politique

President Trump

L’élection de Donalt Trump a servi d’électrochoc auprès de bon nombre de dirigeants de la vallée. Ces derniers se sont rendu compte que leur vision du monde, qui se prétend universaliste, est loin de faire l’unanimité, dans le reste du monde mais aussi au sein même des États-Unis.

Peter Thiel, un des rares soutiens californiens de Donald Trump, considère même que les élites de la côte Ouest affichent un “biais optimiste systématique


“This is always a problem with élites, they’re always skewed in an optimistic direction”

Peter Thiel with the New Yorker
Peter Thiel - Copyright - Business Insider
Peter Thiel – Copyright – Business Insider

Le résultat? Les élites de la Tech ignorent la réalité des difficultés des classes moyennes américaines.

En discutant avec Julien Boubel, investisseur et expert en matière de travail du futur, nous avons pu mesurer les tensions qui peuvent exister au sein même des États-Unis, en particulier entre la côte Est — dont l’activité économique, à l’image de l’Europe, s’est construite à la Belle Époque durant la deuxième révolution industrielle — et la côte Ouest — dont la prospérité provient majoritairement de l’émergence de Hollywood au cours des années 1920 et de l’émergence de l’économie digitale à partir des années 60. Selon Julien, il existe une lutte d’influence entre côte Ouest et Est. Car la côte Est voit, peu à peu, l’ensemble de ses activités disruptées par les startups de la vallée : Tesla remet en cause les constructeurs de Dedroit ; les cryptomonnaies, comme le Facebook Coin et la Libra, pourraient remettre en cause une partie des activités de la FED. Finalement sur la côte l’Est, il ne resterait que Washington…

Autrement dit, là où autrefois, on estimait que l’innovation était positive par nature. Aujourd’hui, beaucoup paraissent plus suspicieux : ils cherchent à trouver le rapport de force — politique, économique, commercial ou industriel — qui se cache derrière un produit futuriste ou un modèle économique novateur. 

C/ La professionalisation de l’innovation veut dire que les investisseurs se spécialisent davantage

Ainsi, au minimum, l’ensemble des investisseurs que nous avons rencontrés se spécialisent dans un tour de financement particulier (série A, série B… série H, ou bien pre-seed, seed). Car, chaque tour de financement requiert des compétences spécifiques : l’exceller à l’un ne constitue pas un passe-droit pour le suivant.

De plus, chaque investisseur se spécialise dans un secteur particulier que celui-ci soit une industrie (le retail, la banque et assurance, l’IT…) ou bien une technologie en particulier (l’intelligence artificielle, la réalité augmentée, la cyber sécurité…)

D/L’investisseur qui m’a le plus impressionné? Fabrice Grinda !

Fabrice Grinda, un des investisseurs les plus performants au monde

L’investisseur qui m’a peut-être le plus marqué de tous, reste Fabrice Grinda. Celui-ci s’intéresse à un tour de financement particulier : le pre-seed. Et, par ailleurs, il a développé une vision très originale de son métier tout en se spécialise dans un type de modèle économique en particulier : la place de marché, ce qu’on appelle également les « plateformes ». J’aurais l’occasion dans les semaines à venir d’évoquer plus en détail l’approche de Fabrice Grinda.

Mais, je permets d’évoquer son fait d’arme plus étonnant : Fabrice réalise un taux de retour sur investissement de 167% depuis 2009 sur la base de plus de 400 investissement, ce qui fait de lui l’investisseur le plus performance au fond, selon Forbes.

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