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“Les enjeux de l’innovation des startups et des grands groupes diffèrent”, selon Jean-Louis Charléty, DG d’Orange Vallée


140419 - Jean-Louis Charléty, co-fondateur et Directeur Général d'Orange Vallée
Jean-Louis Charléty, co-fondateur et Directeur Général d’Orange Vallée

Quelle est la différence fondamentale entre l’innovation dans les grands groupes et l’innovation dans les startups? Pourquoi l’innovation relève-t-elle d’un enjeu différent pour les startups et les grands groupes? Voici une question que j’ai traitée avec Jean-Louis Charléty, co-fondateur et Directeur Général d’Orange Vallée, une organisation chargée de l’innovation de rupture au sein d’Orange.

I/ L’innovation répond à des attentes différentes

Selon Jean-Louis Charléty, il y a une différence fondamentale entre l’innovation dans les startups et l’innovation dans les grands groupes.

L'enjeu de l'innovation pour une startup
L’enjeu de l’innovation pour une startup

 

D’un côté, les startups exploitent en général une  innovation qu’elle soit technique, marketing, tarifaire etc…. Quand une startup se lance , elle ne dispose pas de chiffre d’affaire et elle est incitée à le développer au plus vite d’autant que le fondateur est en général investisseur, actionnaire et se rémunère principalement grâce à la valeur prise par sa société .

À l’inverse, la grande entreprise a souvent à perdre dans l’innovation. En effet, celle-ci dispose déjà d’une activité qui génère chiffre d’affaire et profit. Par conséquent, le seul intérêt de l’entreprise dans l’innovation, c’est de parvenir à générer une nouvelle activité qui va assurer de façon certaine plus de chiffre d’affaires et de profit que ne le fait l’activité existante.

 

Par ailleurs, investir une nouvelle activité ou un nouveau marché qui, bien souvent, demande de nouvelles compétences, entraîne de nouveaux investissements et donc de nouveaux coûts.

 

II/ Dans les grands groupes, l’innovation a une  contrepartie 

Innover dans un grand groupe veut parfois dire :

  • Arbitrer entre activités nouvelles et activités existantes qui génèrent pourtant du chiffre d’affaires et qui peuvent toujours être rentables à court/moyen terme
  • Se recentrer sur de nouvelles activités, ce qui demande un investissement et qui peut être coûteux
  • Accepter une prise de risque

On voit donc bien la difficulté qu’il y a à innover dans les grandes entreprises. Celle-ci est parfois perçue comme une alternative au développement, voire une cannibalisationdes activités existantes. Cela est particulièrement vrai lorsque l’innovation s’accompagne d’une rupture technologique qui peut rendre obsolète un business model existant (le passage de l’analogique au numérique, Internet, les mobiles, la forfaitisation des offres etc…). C’est aussi vrai et parfois dramatique lorsque les conditions de marché changent : ouverture des frontières ou modification des conditions réglementaires par exemple.

III/Les enjeux de l’innovation des startups et des grands groupes diffèrent

A/ Les grands groupes sont victimes du dilemme de l’innovateur

La situation des grands groupes est marquée par un dilemme cornélien :

  • garder une activité qui existe
  • se lancer dans une activité qui n’existe pas mais qui serait promise à un grand avenir

 

Clayton Christensen, professeur à Harvard Business School
Clayton Christensen, professeur à Harvard Business School

Il faut dire qu’il y a là les éléments et les ingrédients constitutifs de ce que Clayton Christensen, un professeur à Harvard, appelle le dilemme de l’innovateur. Le dilemme de l’innovateur, c’est le dilemme il y a entre le fait de continuer à développer une activité qui génère du chiffre d’affaire et le fait de développer une activité qui n’en génère pas encore mais qui pourrait en générer à l’avenir.

B/ L’innovation dans les startups

À l’inverse des grands groupes, la situation des startups est totalement différente. Les startups, elles, n’ont pas d’activité existante. Elle n’encourent donc aucun risque de cannibalisation et n’ont rien à perdre. Au contraire, leur objectif est d’exister. Exister, cela veut dire développer son chiffre d’affaire le plus rapidement possible. Pour cela, les startups s’appuient sur du capital-risque ou tout autre écosystème pouvant les aider dans leur développement. Toute l’équipe de la jeune entreprise est mue par un même objectif : celui de développer une nouvelle activité.

Hernan Corés, un conquistador espagnol, fait brûler les navires
Hernan Corés, un conquistador espagnol, fait brûler les navires

Un parallèle décrit bien la situation, à mes yeux : le navigateur espagnol Cortés et les conquistadors espagnols ont décidé, lors de leur arrivée en Amérique du Sud, de couper les ponts et de faire couler les navires, afin d’empêcher toute possibilité de retour en arrière. Les startups sont en quelque sorte dans cette configuration là. Elles n’ont rien à perdre. Elles ont tout à gagner. Il n’y a qu’un seul mot d’ordre : innover !

 

 

Lectures complémentaires :

  • Pour en savoir plus sur les ruptures dans le marché des télécoms et de l’IT d’ici 2020, veuillez vous référer à ce billet
  • Pour une analyse de Luc Bretones sur Comment améliorer l’efficacité de l’innovation pour accélérer la croissance ?, veuillez vous référer à ce billet
  • Pour savoir si la TV connectée est une opportunité ou une menace pour les opérateurs télécoms, veuillez vous référer à ce billet
  • Enfin, pour comprendre ce qu’est un marché d’innovation, veuillez vous référer à ce billet

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