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Le digital permet de parler au client final sans se référer aux intermédiaires, une discussion avec François Darchis, membre du COMEX d’Air Liquide


François Darchis - AIr Liquide

Comment retrouver le sens du client final dans une entreprise technologique davantage tournée vers la technique ? En quoi la technologie digitale permet-elle aux acteurs qui sont en amont de la chaîne de valeur de s’adresser directement au client final ? De quelle manière permet-elle de mieux comprendre les besoins du client final ? Voici quelques-unes des questions que François Darchis, membre du comité exécutif d’Air Liquide, et moi-même avons évoquées au cours d’un entretien récent.

 

Présentation de François Darchis

François Darchis - AIr Liquide
François Darchis – Air Liquide – (C)

Au sein du Comité exécutif d’Air Liquide, François Darchis pilote la Recherche et développement, identifie de nouveaux métiers, pilote l’innovation et la propriété intellectuelle. Il dirige également la branche d’activité « industriel marchand ».

 

Le secteur de l’édition et le secteur des gaz industriels ont davantage de points communs que vous ne pourriez le croire

 

Notre discussion a démarré lorsque j’ai parlé à François Darchis de mon expérience avec le monde de l’édition. Mon projet de livre a été retenu parce que Marguerite Cardoso, éditrice chez Eyrolles, avait pressenti que j’avais une compréhension du marché pertinente.

 

Mieux comprendre les attentes de ses lecteurs ou l’utilité du blog

Le fait de tenir un blog m’a permis de tester une quantité de sujets. Parmi les 230 articles que j’ai pu écrire :

  • certains articles ont suscité un réel intérêt sur une période longue
  • d’autres articles ne suscitaient qu’un intérêt ponctuel
  • enfin, une troisième catégorie d’articles n’a suscité qu’un intérêt limité

J’ai construit la table des matières de mon livre sur la base des articles les plus lus et partagés sur les réseaux sociaux. Ce contact permanent avec mon marché m’a permis de mieux comprendre le client de mon client : le lecteur.

Par le passé, une telle analyse du marché français aurait été beaucoup plus onéreuse et plus chronophage à mettre en œuvre. Si je n’avais pas eu mon blog pour évaluer l’intérêt que pouvaient susciter mes articles auprès de mon lectorat, je n’aurais jamais pu identifier les éléments qui suscitent effectivement l’intérêt.

 

Station à hydrogène et blog… même combat

 

François Darchis m’a expliqué qu’on pouvait raisonner dans les mêmes termes chez Air Liquide. Au sein des entreprises technologiques, on se retrouve parfois à plusieurs intermédiaires du client final. Lorsqu’une vente est effectuée auprès du client final, chaque intermédiaire prend une partie de la valeur avant de la transmettre à d’autres fournisseurs, si bien que le fournisseur qui se retrouve au bout de la chaîne doit se contenter d’un partage de valeur qui ne lui est pas favorable.

Il existe deux solutions pour capturer davantage de valeur.

  • La première approche — très onéreuse — consiste à acquérir ses concurrents. La concentration industrielle des fournisseurs permet de réduire l’intensité concurrentielle et restaurer les marges.
  • La deuxième approche vise à parler directement au client final. Ceci présente un double intérêt :
    • Elle assure une meilleure compréhension de ses besoins afin d’innover en fonction de ses retours non seulement en fonction de ceux de tel ou tel intermédiaire.
    • Elle permet de capturer davantage valeur puisque la valeur n’est pas saisie par des intermédiaires.

 

La voiture à hydrogène ou comment retrouver le sens du client final dans un contexte B2B

La Station hydrogène d'Air Liquide à Paris - Photo Air Liquide
La Station hydrogène d’Air Liquide à Paris – Photo Air Liquide

Pour illustrer son propos, François m’a parlé de l’installation de la station à hydrogène située à proximité des quais de Seine. Ainsi, Air Liquide s’offre la possibilité de s’adresser directement au client final au lieu de passer par un réseau de distribution.

Il a pu se rendre compte qu’une telle installation permet de se rendre compte de quelque chose de très simple : la principale difficulté (« pain point ») des voitures fonctionnant avec des batteries électriques reste le temps de chargement. Par exemple, on trouve un propriétaire d’une voiture électrique d’une marque reconnue qui se voit contraint de brancher sa voiture sur le secteur de son domicile afin de recharger son automobile. Mais, comme le propriétaire habite le troisième étage, il doit faire passer le câble d’alimentation… par le balcon.

François Darchis a installé une station hydrogène en plein centre-ville afin d’exposer le savoir-faire au plus grand nombre. Ceci permet de montrer en quoi cette technologie de recharge s’avère beaucoup plus simple que les technologies traditionnelles. En outre, la technologie à hydrogène gagne à être présentée comme une technologie électrique. Celle-ci ne fonctionne pas selon un « fueling » mais plutôt selon une recharge.

Pour le client final, une telle distinction demeure très utile. En effet, pour beaucoup de consommateurs, le gaz à hydrogène véhicule des images qui ne sont pas toujours valorisantes. On s’imagine que l’hydrogène peut s’enflammer, qu’il est un gaz instable. Et surtout, l’idée de faire fonctionner une automobile avec un gaz comme celui-ci paraît très éloignée de l’imaginaire du consommateur.

Cet exemple permet de montrer que parler directement au consommateur est une façon de comprendre les a priori de celui-ci, de modifier son discours marketing, et même d’apporter des modifications au fonctionnement technique de l’innovation. Voici donc comment retrouver le sens du client.

 

 

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