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La tolérance à l’erreur : comparaison entre la culture américaine et française


France-USA

Aux côtés d’Olivier Arnaud, Alizée Doumerc, Camille Caubriere, Nathalie Fanfant, Quentin Perraudeau, Laurent Allias et Maxime Verner, j’étais invité à une table ronde organisée par Rami Zouaoui, Président de LinkStarters, le réseau international des jeunes entrepreneurs. Une des questions qui m’a été posée est celle de la tolérance à l’erreur. L’idée était que la culture américaine accepterait davantage l’erreur que la culture française, ce qui permettrait de réaliser plus d’expérimentations, ce qui, par la suite, donne lieu à des innovations plus nombreuses. La tolérance à l’erreur serait donc une condition de réussite de l’innovation. J’ai répondu à la question par une image et un élément d’analyse.

 

I/ Il existe effectivement une tolérance à l’erreur très différente entre la France et la Silicon Valley

Comme souvent quand on parle des enjeux de l’entreprise, le diable se niche dans le sens des mots. Qu’est-ce qu’on entend par le vocable « erreur » en France ? Qu’est-ce qu’on entend par le même mot aux États-Unis ?

Mistakes happen
Mistakes happen
  • En France — et je risque ici d’être sans doute caricatural — on clame depuis quatre ou cinq ans, dans bon nombre de directions d’innovation, « un droit à l’erreur ». Et, lorsque l’on s’intéresse à ce que le terme signifie, on se rend compte que très souvent une erreur pourrait être le fait d’envoyer un e-mail comportant quelques fautes d’orthographe ou bien de réaliser une présentation qui ne serait pas avec très claire.
  • Dans la Silicon Valley, on entend parfois qu’un investisseur ne peut pas être pris au sérieux tant qu’il n’a pas perdu 25 millions de dollars en investissement. Un investisseur aurait besoin en quelque sorte de faire ses preuves notamment par l’échec avant de pouvoir être pris au sérieux, étant entendu que l’on attend de lui qu’il gagne 500 millions de dollars

Quelles conséquences?

  • En France, un innovateur qui aurait appris de ses erreurs se montrerait désormais capable de rédiger un e-mail sans commettre de fautes d’orthographe. Voilà qui est intéressant, mais quelle est la création de richesse?
  • Aux États-Unis, un investisseur qui aurait, lui aussi, appris de ses erreurs serait capable de générer 500 millions de dollars.

Cette image sans doute caricaturale illustre la différence de signification que nous mettons derrière le même mot. Plus encore, cela illustre la profonde différence des enjeux qui sont ceux de l’innovation ainsi que la différence radicale de proportion entre la France et les États-Unis. Les montants ne sont pas les mêmes ; les enjeux non plus.

II/ Un élément historique donne une explication à la différence de tolérance à l’erreur

Alors, comment expliquer une telle différence ? Pour ma part, l’explication réside dans le fait que l’économie française et l’économie de la Silicon Valley sont foncièrement différentes.

Paris Belle Epoque - Exposition Universelle
Paris Belle Epoque – Exposition Universelle
  • L’économie française demeure une économie d’héritiers : 100 % de CAC 40 a été créés à la Belle Époque. L’enjeu pour ces entreprises centenaires ne consiste pas tellement à créer de nouveaux produits, mais plutôt de les améliorer sans cesse. Par exemple dans le domaine de l’automobile, de l’aéronautique on cherche chaque année à faire de meilleurs avions et de meilleures voitures, en améliorant la puissance du moteur, en diminuant la consommation de carburant, en optimisant la fiabilité des produits. Lorsque l’enjeu économique consiste à améliorer des produits existants, on voit bien que la difficulté créative paraît moindre. Finalement, la feuille de route demeure simple : il s’agit d’améliorer le produit par rapport à l’année passée. Par conséquent, la tolérance à l’erreur est également moins importante

 

Companies in Silicon Valley
Companies in Silicon Valley
  • Mais, dans la Silicon Valley, l’économie demeure une économie d’innovation. Il s’agit d’inventer des produits qui n’existent pas encore tels que des ordinateurs, des moteurs de recherche, des tablettes, des réseaux sociaux, des nouveaux modes de consommation digitaux… Par conséquent, commettre une erreur paraît beaucoup plus naturel. De fait, on ne sait pas très bien ce qu’il faut inventer. Donc, on procède à tâtons. On mène des expérimentations et en apprenant de ses erreurs

 

 

 

 

Voici donc ce qui permet d’expliquer la différence de tolérance à l’erreur entre la France et la Silicon Valley. Telle est en tous cas mon analyse. Je serais heureux d’écouter la vôtre.

 

 

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  • […] Aux côtés d’Olivier Arnaud, Alizée Doumerc, Camille Caubriere, Nathalie Fanfant, Quentin Perraudeau, Laurent Allias et Maxime Verner, j’étais invité à une table ronde organisée par Rami Zouaoui, Président de LinkStarters, le réseau international des jeunes entrepreneurs. Une des questions qui m’a été posée est celle de la tolérance à l’erreur. L’idée était que la culture américaine accepterait davantage l’erreur que la culture française, ce qui permettrait de réaliser plus d’expérimentations, ce qui, par la suite, donne lieu à des innovations plus nombreuses. La tolérance à l’erreur serait donc une condition de réussite de l’innovation. J’ai répondu à la question par une image et un élément d’analyse.  […]

  • […] “ Aux côtés d’Olivier Arnaud, Alizée Doumerc, Camille Caubriere, Nathalie Fanfant, Quentin Perraudeau, Laurent Allias et Maxime Verner, j’étais invité à une table ronde organisée par Rami Zouaoui, Président de LinkStarters, le réseau international des jeunes entrepreneurs. Une des questions qui m’a été posée est celle de la tolérance à l’erreur. L’idée était que la culture américaine accepterait davantage l’erreur que la culture française, ce qui permettrait de réaliser plus d’expérimentations, ce qui, par la suite, donne lieu à des innovations plus nombreuses. La tolérance à l’erreur serait donc une condition de réussite de l’innovation. J’ai répondu à la question par une image et un élément d’analyse.”  […]

  • […] Aux côtés d’Olivier Arnaud, Alizée Doumerc, Camille Caubriere, Nathalie Fanfant, Quentin Perraudeau, Laurent Allias et Maxime Verner, j’étais invité à une table ronde organisée par Rami Zouaoui, Président de LinkStarters, le réseau international des jeunes entrepreneurs. Une des questions qui m’a été posée est celle de la tolérance à l’erreur. L’idée était que la culture américaine accepterait davantage l’erreur que la culture française, ce qui permettrait de réaliser plus d’expérimentations, ce qui, par la suite, donne lieu à des innovations plus nombreuses. La tolérance à l’erreur serait donc une condition de réussite de l’innovation. J’ai répondu à la question par une image et un élément d’analyse. I/ Il existe effectivement une tolérance à l’erreur très différente entre la France et la Silicon Valley Comme souvent quand on parle des enjeux de l’entreprise, le diable se niche dans le sens des mots. Qu’est-ce qu’on entend par le vocable « erreur » en France ? Qu’est-ce qu’on entend par le même mot aux États-Unis ?  […]

  • […] Ainsi, l’investisseur défensif ne paraît pas être un candidat naturel au capital risque tant l’incertitude est grande. Mais, dans le capital-risque, la startup n’a aucune histoire financière. De plus, la plupart des documents ne paraissent pas être aux normes. Certes, une analyse financière est conduite, mais dans la mesure où les données financières demeurent récentes, celles-ci n’excèdent que rarement une ou deux pages. De plus, l’ensemble des documents évoquant les différents statuts de l’entreprise ne sont, en général, pas aux normes. Donc, l’information factuelle à disposition de l’investisseur paraît beaucoup plus limitée que lorsque l’on investit dans des entreprises établies. À cela il faut ajouter que les décisions se comptent souvent en millions d’euros. L’investisseur se trouve par conséquent dans une situation paradoxale : il lui est demandé de prendre une décision d’investissement significative alors même qu’il dispose d’informations factuelles éparses. De là, la nécessaire tolérance à l’erreur. […]

  • […] Ainsi, l’investisseur défensif ne paraît pas être un candidat naturel au capital risque tant l’incertitude est grande. Mais, dans le capital-risque, la startup n’a aucune histoire financière. De plus, la plupart des documents ne paraissent pas être aux normes. Certes, une analyse financière est conduite, mais dans la mesure où les données financières demeurent récentes, celles-ci n’excèdent que rarement une ou deux pages. De plus, l’ensemble des documents évoquant les différents statuts de l’entreprise ne sont, en général, pas aux normes. Donc, l’information factuelle à disposition de l’investisseur paraît beaucoup pluslimitée que lorsque l’on investit dans des entreprises établies. À cela il faut ajouter que les décisions se comptent souvent en millions d’euros. L’investisseur se trouve par conséquent dans une situation paradoxale : il lui est demandé de prendre une décision d’investissement significative alors même qu’il dispose d’informations factuelles éparses. De là, la nécessaire tolérance à l’erreur. […]